Contextualiser SMS (3/4)

A la suite du traitement de la fantasy poursuivons l’exploration des possibles contextualisations de SMS. La science-fiction et l’anticipation s’appuient suffisamment sur un prolongement de notre réalité pour ne pas changer conséquemment l’approche classique de SMS. Toutefois, les domaines scientifiques demeurent assez cloisonnés pour nécessiter une approche plus stricte en la matière et le space-opera comme le post-apocalyptique apportent souvent des types de jeu avec des besoins bien particuliers. Il existe différentes façons d’aborder la SF selon le contexte et donc plusieurs manières d’y adapter SMS.

La hard SF

S’appuyant sur une fiction « hard science » la hard SF considère que l’ensemble des connaissances scientifiques acquises par notre civilisation représentent les limites absolues de ce qui est possible. Autrement dit, l’on exclue d’emblée ce qui est improbable ou fantaisiste et l’on respecte à la lettre ce que les quatre grandes forces universelles (l’électromagnétisme, la gravitation, la force nucléaire faible, la force nucléaire forte) nous autorisent. Dans les limites de ces connaissances, rien de « surnaturel » n’existe sans explication. Autrement dit, il y a des phénomènes et l’on peut, sur chacun d’eux, élaborer une théorie, réaliser des expérience et démontrer de manière scientifique de quoi il s’agit. Bien entendu, quel que soit le degré d’avancement des connaissances scientifiques et l’histoire de la civilisation depuis le présent, la hard SF nous place dans un contexte où la science a plus de réponse que de nos jours, et est capable de réaliser des choses impossibles à nos actuels scientifiques (pour de simple question de moyens la plupart du temps). Il n’en reste pas moins que nous avons les clés pour en comprendre tous les tenants et aboutissants.

Dans un tel contexte, SMS n’est pas moins adaptable que dans un contexte contemporain. L’on peut chercher à cloisonner les domaines scientifique dans des Modules prédéfinis, arguant que le modèle éducatif ne permet pas d’acquérir tous les bagages intellectuels à la fois, il n’en reste pas moins que toute réalisation scientifique requiert souvent plusieurs métiers différents. Si, dans un tel modèle sociétal, la création scientifique devient un élément fondateur du jeu, alors il faut élaborer des règles permettant aux personnages de mesurer les compétences et de la façon dont les réalisations et les découvertes peuvent être faites.

Encore une fois, si l’on élabore un jeu de Modules prédéfinis pour cadrer la recherche, les avancements et la création scientifique, on sera tenté de créer des domaines généraux, des spécialités technologiques ou des expertises pointues permettant d’aborder et de gérer telle ou telle problématiques. Si, sur le principe, cela finit par ressembler à s’y méprendre à ce que l’on ferait de la magie dans les univers de Fantasy, c’est parce que SMS s’y prête volontiers et que le mécanisme de base induit cette manière de faire.

Ainsi, au lieu de faire face à des types de magie nous abordons la conception technologique sous l’angle d’une science par Module comme la physique quantique, l’astrophysique, la biologie moléculaire, etc.. Chaque science sera le socle de départ à partir duquel des connaissances plus ou moins pointues dans ce domaine permettra au « savant » d’extraire une compétence lui permettant de réaliser telle ou telle découverte, telle ou telle conception.

Le space opera

Le space opera, considéré comme sous-genre de science-fiction pourrait tout aussi bien être un sous-genre de la fantasy. Star Wars, largement considéré comme SF et plus particulièrement space opera n’en est pas moins un récit très caractéristique de la fantasy avec sa magie (la Force) et ses chevaliers blancs et noirs (les Jedi et les Sith). Si l’on excepte cette forme particulière de space opera en se concentrant sur l’idée que tout n’est que science donc explicable, les space opera jette les bases d’un univers généralement sans limites mettant l’accent sur les voyages spatiaux, l’exploration, les batailles et la grandiloquente immensité de l’espace et de ses mystères irrésolus.

Ce qui est caractéristique du space opera, et qui est finalement aussi valable dans ce qu’on pourrait appeler le « sea opera« , c’est l’utilisation de véhicules autonomes plus ou moins grand, comportant plus ou moins d’équipage, généralement armé et capable de faire face à l’inconnu. Dans un tel contexte, le véhicule devient très souvent un « personnage » à part entière, avec ses qualités, ses défauts, sont histoire et même sa réputation (ex. The Millennium Falcon). Il sera intéressant de qualifier ce « personnage » non comme un PNJ mais comme l’extension d’un PJ. La technique consiste à accorder des Modules à l’engin. Ces Modules sont offert à ses membres d’équipages selon les opérations réalisées. Si j’illustre par l’exemple le cas du Faucon Millénium de Star Wars, l’on pourrait lister les modules suivants :

  • Hyper-drive bricolé (3)
  • Pannes aléatoires (-3)
  • Caches de contrebande (2)
  • Réputation Raid de Kessel en 12 parsecs (1)
  • Cargo correllien modifié (4)

L’on comprend assez rapidement qu’une personne à bord du Faucon Millenium hérite d’un ou plusieurs de ces Modules lorsqu’il est confronté à une situation les mettant en jeu. Si elle veut se cacher à bord les caches de contrebande lui seront utiles. Si elle veut vanter les mérites de l’appareil, la réputation du Faucon sur le Raid de Kessel devrait l’y aider. Selon le contexte, les autres Modules cités entreront en jeu tant dans les performances de l’appareil que dans les manœuvres tentées avec.

L’on pourrait, à ce titre, décider de matérialiser les avantages ou désavantages de l’appareil de façon plus rigoureuse dans un modèle qui serait valable pour tous les vaisseaux. On s’intéresserait alors à des caractéristiques communes et récurrentes dans le pilotage pour en faire des Modules prédéfinis positifs ou négatifs selon le modèle :

  • Manoeuvrabilité
  • Armement
  • Vitesse
  • etc.

A noter qu’il n’est pas forcément utile, dans ce modèle de représentation, de matérialiser la portée et la double lecture (positif / négatif) de chaque caractéristique. Il suffira de noter un score de 0 pour une valeur moyenne, une valeur négative pour un Module négatif et une valeur positive pour un Module positif. L’intérêt de ce descriptif simplifié est d’être valable pour tous les types de bâtiment et d’avoir la même fonction qu’un Module positif ou négatif selon le cas. En revanche, chercher un équilibrage quelconque entre les véhicules et leur coût en point d’expérience a moins d’utilité, ce qui n’interdit pas un personnage d’investir de sa propre expérience dans le Module d’un vaisseau qui lui appartient, pour peu que son histoire le justifie.

A l’instar d’un personnage « vivant », les machines, les véhicules et les vaisseaux peuvent être « blessé ». La contextualisation dans SMS de tels effets se calquera sur la logique appliquée sur le vivant. La quantité de dommages structurels visée indiquera quel niveau de difficulté sera appliqué. Il en découlera aussi que la description d’un dommage structurel sera important pour déterminer en quoi l’engin sera ensuite handicapé et dans quelle proportion, exactement comme on le ferait pour un être vivant.

Vous pouvez toutefois opter pour une toute autre interprétation selon le niveau de détails stratégique et technique auxquels vous souhaitez faire appel. Si vous mettez l’accent sur les capacités d’un vaisseau à manœuvrer, attaquer, se défendre, etc. vous serez tenté d’affecter chacune de ces caractéristiques par un jeu de règles plus spécifique et créer une échelle de difficulté différente. Par exemple, établir une échelle de difficulté pour diminuer en « point » les capacités de manœuvre d’un adversaire. Vous vous écarterez alors du modèle descriptif proposé initialement par SMS pour disposer d’un modèle plus abstrait.

Le post-apocalyptique

Le contexte post-apocalyptique mêle généralement les deux éléments ci-dessus à savoir un avancement significatif dans les sciences et les découvertes dont il ne reste que des bribes, ainsi qu’un développement notable des véhicules autonomes et des objets à la fois utile, rare et précieux. Le post-apocalyptique repose sur des tonnes d’interprétations différentes mais se caractérise le plus souvent par un appauvrissement des ressources vitales pour lesquelles les communautés ayant survécu à l’apocalypse se battent.

C’est dans ce contexte que se dresse des héros solitaires ou en petit groupe, dans le genre de Mad Max, pour lesquels la possession d’un véhicule est une nécessité. De telles machines sont forcément le fruits de customisations et de réparations à outrance avec des matériaux et pièces de substitution qui en changent grandement les propriétés et les distingue les unes des autres. On retrouvera dans ce modèle ce qui caractérise les vaisseaux du space opera et l’on pourra sans mal réutiliser la même approche pour contextualiser l’usage des véhicules.

Le post-apocalyptique met aussi l’accent sur la désuétude de certaines connaissances. On peut ainsi se demander quel serait l’intérêt de développer des Modules d’une connaissance peu ou pas employée dans un contexte post-apocalyptique, mais c’est oublier qu’un Module s’extrapole, qu’un domaine couvre des connaissances connexes et non réduites à leur seule définition. La crédibilité d’un personnage peut dépendre de la présence ou non de Modules représentant ce genre de connaissances, surtout si le personnage en question a vécu l’avant-apocalypse. Si par exemple il semble évident que l’informatique ne sert à rien lorsqu’il n’existe plus de réseau électrique, c’est négliger l’aspect technique et logique qui sous-tend l’utilisation des ordinateurs lequel comporte des applications concrètes en dehors de la machine comme la logique, le comptage en différentes bases, le fonctionnement des circuits imprimés et des micro-processeurs, la mécanique du disque dur, etc..

Les problèmes d’échelle

SMS étant avant tout un système de résolution descriptif, l’idée selon laquelle la taille des objets en interaction joue un rôle dans leur efficacité respective est une évidence. Par exemple, dans le cas de combats spatiaux, le raisonnable peut se confronter à la démesure. Si l’on imagine aisément comment un simple X-Wing peut détruire une Etoile Noire, l’on sait par ailleurs que son armement conventionnel ne peut techniquement rien contre elle. En dehors de points faibles bien particuliers, la somme de dégâts réalisables par un X-Wing sur l’Etoile Noire est négligeable. L’inverse n’est pas vrai. Le moindre turbo-laser démolit d’un coup le X-Wing.

Dans un modèle descriptif, ni les capacités du X-Wing, ni celles de l’Etoile Noire n’entrent en ligne de compte dans une confrontation directe. Nous ne sommes pas en train d’opposer la puissance brute de chaque appareil, totalement incomparable, mais bien de raconter l’histoire du X-Wing qui se glisse entre les reliefs du colosse jusqu’à une bouche d’aération minuscule par laquelle il doit larguer un explosif.

Dans un modèle non descriptif, où le chiffre aura une certaine importance, la notion d’échelle peut jouer un rôle significatif dans l’interprétation des résultats de la simulation. On prendra cas de la représenter par un système de taille comparée et d’échelle. Cela n’avait pas encore été abordé jusque là, mais SMS est doté historiquement d’un système de taille comparé jouant ce rôle. La différence de taille négative y est à l’avantage du plus petit pour esquiver et toucher son adversaire, et la positive à l’avantage du plus grand pour faire des dégâts et les encaisser. Une telle échelle peut parfaitement être utilisée sur des vaisseaux spatiaux pour simuler de façon objective la différence.

Cette dernière possibilité n’est toutefois pas un usage conseillé de SMS qui devient extrêmement limité dès lors qu’on le prive d’une partie de sa substance narrative.


Cet article s’évertue principalement à rappeler que le SMS est affranchi de beaucoup de limitations inhérentes aux systèmes dit traditionnels. Le contextualiser dans la science-fiction n’est pas plus difficile à faire que dans le contemporain ou la fantasy, attendu que ce n’est même pas indispensable. Tout dépend sur quoi l’on veut mettre l’accent. Si l’objectif d’un monde de SF est de produire des combats spatiaux ou du V-Dueling, les Modules s’adapteront aisément à ces contraintes. Le dernier article de cette série traitera de la possibilité d’utiliser SMS de façon archétypale, en produisant des jeux récurrents de Modules permettant de construire des personnages encore plus rapidement par simple assemblage de briques archétypales.

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