Croyances et foi en Alméra

Aux seins des civilisations alméraines, les croyances sont relativement structurantes dans les sociétés et communautés du continent. Comme une Europe qui serait à peine sortie de l’Obscurantisme, l’Alméra post-Uyadan tantôt a perdu de sa béate admiration (ou crainte) des Disciples d’Aod, tantôt a reconnu que la foi en un dieu n’est jamais qu’une voie et non une nécessité, sans pour autant abandonner complètement ce qui constitue le cœur de sa culture. En cause dans ce bouleversement, Uyadan, bien sûr, qui, en remettant à zéro l’histoire, a également détruit ce qui faisait le respect des religions. Tout autant responsables, les Aodis, qui, prétendument demi-dieux, n’ont que leur puissance propre et leur parole pour véhiculer l’idée de l’existence d’Aod. Et pourtant, ça marche !

Aod

Le nom d’Aod est largement connu dans tout Alméra. Pratiquement tout le monde sait à quoi l’on fait allusion quand on parle de lui. Même si, dans l’Histoire écrite, Aod ne s’est jamais manifesté directement, déléguant en cela son ire à ses Disciples, ceux qui vinrent punir les humains d’un forfait commis par leur dirigeant de l’Empire d’Asten, il est communément admis que de croire et d’avoir la foi en Aod est source d’un bien être, d’une sérénité et d’un pouvoir concret. Les almérains nomment ces capacités sous le vocable de pouvoir de la foi ou magie divine. Cette distinction linguistique est d’ailleurs très caractéristique d’Alméra, attendu que tous ne reconnaissent pas à Aod l’origine de tous les pouvoirs divins, ce qui les relie simplement à la foi.

Le culte d’Aod

L’Eglise d’Aod peut compter sur onze chantres, les Aodis, pour étendre sa parole. Pour ceux qui reconnaissent à ces immortels une origine divine et une ascendance véritable avec les Disciples d’Aod (après tout, c’était avant Uyadan et déjà nébuleux comme en atteste les livres d’histoire), les Aodis, sans être obligatoirement des prêtres ou des chevaliers de la foi, sont, à tout le moins, la preuve vivante de l’existence d’une forme de vie supérieure. La foi en Aod est devenue d’autant plus importante après Uyadan lors de la Levée des Morts ou l’utilisation massive de la magie divine devint le seul rempart efficace contre le chancre mort-vivant.

C’est dans ce besoin constant de lutte contre les Morts que l’Eglise d’Aod et la Chevalerie du Destin ont acquis la puissance et l’importance qu’ils ont aujourd’hui. Décelée dès l’adolescence dans la population, l’affinité avec le pouvoir de la foi implique les jeunes aodissiens dans ces institutions afin de les renforcer. Pratiquement tous les Chevaliers du Destin disposent des pouvoirs divins et l’immense majorité les doivent à leur foi envers Aod. De là à penser que la nécessité de répandre la parole d’Aod et d’accroître l’effectif des croyants aient été fomentée, il n’y a qu’un pas.

D’un point de vue plus pragmatique, l’Eglise d’Aod en Aodissia fédère un grand nombre de croyances plus ou moins en phase avec le dogme initial. Ce dernier n’étant pas imposé comme une vue indiscutable et comme nombre de faits et de légendes restent interprétables, l’Eglise d’Aod s’ouvre de fait à des variations importantes de son culte en fonction des cultures et des régions. Ainsi, bien qu’il s’agisse d’une religion d’état, le Royaume d’Aodissia demeure laïque et tend à catégoriser la croyance comme le serait une opinion politique.

A noter que le dogme principal place Aod et ses Disciples (au nombre de 11) au centre des événements provoqués par l’Empire d’Asten, les positionnant en tant que sauveurs du monde. L’adoption de cette religion serait, à ce titre, liée au rejet d’une ancienne qui a totalement disparue avec l’Empire. A croire que les Disciples ont véritablement nettoyés et récurés toute trace d’icelle.

Les cultes associés

Associés à l’Eglise d’Aod pour leur ressemblance il existe un certains nombres de cultes qui prennent pour base Aod au sein d’une réinterprétation propre du dogme et qui, sur ce socle, font vivre un culte légèrement différent. Ces cultes sont le plus souvent liés à des cultures non aodissienne. C’est le cas des :

  • Unakisii : qui révèrent principalement les Disciples d’Aod et leur donne des noms différents.
  • Darkiliens : qui révèrent 7 Daevas, des immortels réincarnés, qu’ils ont identifiés comme étant des Disciples d’Aod. Les 4 autres Disciples ne sont pour eux que d’autres identités de certains des 7.
  • Rougemeristes : les antique Okilotes ont adopté Normot, l’un des Disciples d’Aod comme leur dieu principal.
  • Bretanii : qui adorent un panthéon de divinité très similaire à celui des Dudins et ayant comme figures principales les Disciples d’Aod sous des noms différents.
  • Gattenistes : qui adhèrent au culte d’Aod et considèrent que le pouvoir politique est (ou, en tout cas, devrait être) conféré par le droit divin.
  • Assanii : qui révèrent Aod sous un nom différent sans en avoir conscience.
  • Dredanii : qui observent des rites animistes mais ont intégré Aod sous la forme d’un esprit majeur dans leur culture.

Les autres croyances

Il existe trois autres approches religieuses majeures sur Alméra. L’approche philosophique, l’autarcie dogmatique et les religions hybrides.

La foi philosophique.

Les Bordurins, devenus particulièrement remarquables dans ce domaine, sont loin d’être les précurseurs de la foi philosophique qui prend ses racines dans le Domaine Elfin au sein de la plus ancienne culture alméraine. Chez ces derniers, l’univers se développe au sein de Saïel, la force vive, créatrice et source d’inspiration. Les Elfins sont par nature respectueux de cette force qui guide leur existence et dont ils s’estiment être l’incarnation. Ils luttent contre une force opposée, Dahel, à la fois entropique et corruptrice. Saïel n’est pas un dieu pour les Elfins. C’est une énergie qui résulte de l’activité des êtres et des choses et/ou qui l’incarne. A l’inverse, Dahel tend à détruire cette relation existant entre Saïel et l’univers perceptible, brisant ainsi la réalité. A noter que la Levée des Morts n’a pas été perçue par les Elfins comme une manifestation de Dahel et qu’ils s’efforcent de faire se côtoyer le vivant et le mort comme une part de Saïel.

Les Bordurins ont établis des philosophies comparables. S’ils n’existent pas dans leur approche de notion équivalente à Dahel, ils ne placent pas non plus leur version de Saïel sur un piédestal. Par ailleurs, leurs interprétations sont assez différentes en fonction des enseignements professés. On distingue chez eux trois voies majeures qui sont le Fondement, la Force et le Nombre. Dans chacune de ces versions les constituants de l’univers sont considérés comme neutres et à la merci des êtres évolués qui mesurent leur place dans le monde en fonction du rapport qu’ils ont avec ces puissances anonymes.

Dans tous les cas, ces interprétations métaphysiques mènent à un degré de conscience supérieur et accordent, à nombre de pratiquant, des pouvoirs tout à fait équivalent à la magie divine. Ce qu’ils nomment respectueusement le pouvoir de la foi si l’on admet que les capacités surnaturelles qui en découlent dépendent précisément du degré de croyance envers telle ou telle vision de l’univers. Sur ce point, il n’existe aucune interprétation unifiée. Attendu que tout dépositaire des pouvoirs de la foi reconnait dans l’autre l’utilisation de capacités de même nature, il n’y a jamais eu de tentative avérée d’établir une philosophie ou un principe plus générique et universel sur l’usage de la magie divine. A moins de ne pas être concerné directement et d’avoir un regard complètement extérieur, chaque pratiquant de la foi philosophique a forcément le sentiment d’avoir raison sur son interprétation, sans quoi le doute réduirait à néant ses propres efforts.

L’autarcie dogmatique

Pétries de polythéisme ou d’animisme, quelques cultures alméraines nourrissent une foi n’incluant pas l’existence des Disciples d’Aod ou d’Aod même en tant que déités. Leur univers plus limité ou étriqué, ou tout simplement plus protectionniste à l’égard de leur culture, les pousse à observer leurs propres rites sans se soucier du regard ou de l’opinion de leurs voisins. Ceux qui se situent les plus au cœur de ce mouvement religieux sont les Dudins qui, constamment à la recherche du divin et culturellement imprégnés par l’usage de la foi dispose d’un vaste panthéon de divinités dont certaines ont été volontairement rapprochées des Disciples d’Aod à des fins purement diplomatiques. Leur dogme laisse toutefois entendre qu’Aod n’existe pas en tant que tel et que certains de ces dieux (assimilés aux Disciples) sont depuis bien plus longtemps sur Alméra et sont parvenus à bannir l’influence de dieux secrets et malins. Les événements d’Uyadan et de la Levée des Morts ne sont que les prémisses du retour des dieux bannis selon eux. Si les Bretanii, anciennement en contact avec le Royaume Dudin ont adopté bon nombre de déités du panthéon des Dudins ils ont, quant à eux, reconnu qu’ils étaient les Disciples d’Aod et que les Aodis sont leur descendants incarnés. Ce n’est pas le cas des Dudins qui refusent de mélanger cette possibilité avec la pureté de leurs croyances.

Bien loin des considérations polythéistes des Dudins, les Chantepinistes et les Montairinistes sont totalement tournés vers l’animisme. Leurs croyances les poussent à voir toute manifestation surnaturelle comme l’expression des esprits qui sont incarnés dans la matière et les idées. Les Chantepinistes ont tendance à révérer toute une profusion de ces esprits qui embellissent leur environnement alors que les Montairinistes se focalisent sur un seul qui domine leur cadre de vie et rend leur existence plus rude, faisant de toute leur vie une épreuve.

Les religions hybrides

Très différentes les unes des autres, les religions hybrides des Nomades, des Ariolins et des Gnolls sont pour le moins surprenantes tant par leurs origines que leur application. Chacun de ces dogmes sert de guide absolu à l’existence de ces communautés et refuse en grande partie que d’autres forces et/ou idées puissent les influencer.

Les Nomades constituent la seule culture originale du lot dont l’Histoire n’a pas été altérée, puisqu’établie après Uyadan sur la base d’un rejet de la civilisation aodissienne et l’adoption d’une nouvelle croyance : le Tellurisme. Affirmant que de Grands Esprits Telluriques, au nombre de 21, gouvernent leur existence, les Nomades, par petits groupes, se sont forgés une vie d’errance en marge de la société du Royaume. Leur calendrier dominé par ces « mouvements telluriques » les contraignent à se réunir en un lieu déterminé à l’avance tous les trois ans avant de reprendre la route. Au sein de ces Grands Esprits Telluriques, certains sont proches de la figure d’Aod et c’est par ce biais qu’ils accèdent à la magie divine.

Les Ariolins seraient plutôt acquis à la foi philosophique s’ils n’étaient pas plus proche d’être athées. Ils sont majoritairement convaincus que leur seul et unique référent spirituel, le Fassouah (l’équivalent de Bouddha dans notre culture) a atteint la perfection de l’âme en se réincarnant. Présent et identifié réincarnation après réincarnation dans la société arioline, le Fassouah est le maître à penser de leur culture, guidant les êtres dans leur vie mortelle afin qu’au décès leurs âmes s’incarnent à nouveau et vivent pleinement et sereinement une nouvelle existence. A part quelques rares dévoués à différents autres cultes, les Ariolins ne vivent que par et pour cette philosophie sans en tirer le moindre pouvoir.

Les Gnolls ont vécu un événement marquant dans leur histoire mouvementé, mais c’était bien avant Uyadan. L’un d’eux, un Gnoll prétendument immortel appelé Udash s’est présenté comme un dieu incarné et a guidé les Gnolls contre la religion d’Aod (qui aurait donc été présente bien avant la chute de l’Empire d’Asten) en le désignant comme son ennemi. Après une défaite cuisante et avant de disparaître, Udash a contraint les tribus unifiées gnolles survivantes à adopter une autre vie, retirées sur un territoire isolé. Bien des siècles plus tard un Disciple d’Aod apparut à leur yeux comme Udash et leur proposa de vivre en bonne intelligence avec leurs voisins humains. A l’arrivée des Aodis et à la fondation d’Aodissia, les tribus gnolles éclatèrent à nouveau. Les Apostats (rejetant le dogme d’Udash) sont redevenus des animistes. Les autres sont divisés par deux interprétations de leur dieu, l’un est le Conquérant, l’autre, le Protecteur. Malgré cela, ils continuent à vouer un grand respect à leurs anciennes croyances envers les esprits. Cela donne une religion assez disparate vaguement assimilée à un sous-culte d’Aod.

Athéisme marginal, agnosticisme inexistant

La raison pour laquelle l’athéisme est marginal est principalement dû à l’omniprésence de la magie divine dans le quotidien des peuples d’Alméra. Il est difficile dans un tel cas de figure de nier l’existence d’un dieu ou des dieux (les Disciples d’Aod considérés comme tels par de nombreuses cultures). Aodissia et le Royaume Dudin séparant clairement les pratiques magiques, la source du pouvoir de la foi est bien reconnu comme tel et ses bénéfices majoritairement attribués aux dieux. Ceux qui nient cette interprétation sont donc plutôt rares. Techniquement, les tenants de la foi philosophique sont athées, mais il est plus souvent reconnu que leurs pouvoirs, de nature divine, puisent dans des concepts proches ou assimilés à la divinité. Les Elfins échappent toutefois à cette définition de l’athéisme attendu que malgré leur vision philosophique de la vie, ils ne nient pas l’existence des dieux, mais ne leur reconnaissent aucun pouvoir absolu. Considéré comme les seuls vrais athées, les descendants de la civilisation issalienne, les Oraorinii, sont tournés vers l’occultisme et sont majoritairement incapables de concevoir l’existence des déités, sans toutefois nier qu’il existe des forces inexplicables dirigeant l’univers.

L’agnosticisme est, quant à lui, quasi-inexistant. Quelques penseurs et philosophes se sont penchés sur l’idée que la compréhension de leur univers leur est impossible car ils ne peuvent en percevoir qu’une parcelle ne recélant aucune explication valable sur ce qui les entoure. Il n’en tire toutefois aucun enseignement valable. Leur vision est loin d’avoir du sens pour la majorité de la population alméraine.

Cosmogonie

Les croyances alméraines ne se retrouvent pas sur une cosmogonie unifiée, même si la majorité des Aodissiens et des Elfins partagent une vision relativement moderne et commune de la structure de l’univers. Ainsi ces derniers interprètent-ils leur réalité comme la rencontre de deux mondes, le matériel et le spirituel, tout deux limités par un néant insondable. Chacun de ces mondes est composé de différents niveaux d’énergie s’interpénétrant. Selon cette approche, certains pensent qu’il existerait d’autres réalités, accessibles selon des conditions particulières, où la structure serait comparable en nature et différente en résultat. Ceci pour expliquer la Levée des Morts, un phénomène qui tend à démontrer l’apparition de lois de la nature différentes, donc forcément issues d’une autre réalité.

La création de cet univers ne repose apparemment pas sur un acte divin. Dans cette cosmogonie, les dieux ne seraient eux-même qu’un sous-produit de cette structure. La naissance de l’univers reste, dans les différentes légendes écrites, le résultat d’un phénomène naturel issu du néant. C’est en particulier là que naît Saïel selon les Elfins, alors que Dahel est la négation de cet épisode fondateur, un retour vers le néant.

Religieux pluriel

Alméra doit la complexité et la richesses de ses croyances à la pluralité de sa culture. Défendue par les Aodis à l’encontre de la religion qu’ils véhiculent eux-mêmes, cette pluralité est, semble-t-il, le fer de lance de la survie et de la lutte contre le funeste destin que présage la possible expansion de l’Empire des Morts. Pour parvenir à lui opposer des capacités magiques avérées dont la source est admise et reconnue, l’importance de cette vision ne fait aucun doute.

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